Truman succèdera-t-il à Truman ?

31/10/1947

 

Parmi les événements qui peuvent commander notre destin, apparaissent, en premier lieu, les futures élections présidentielles des États-Unis. Que dis-je ? Elles pèsent déjà sur notre destin. Les difficultés que rencontre l'aide américaine s'y trouvent liées.

Entre le président Truman et les républicains, c'est une sorte de cache-cache. Tous sont persuadés que l'aide à l'Europe est nécessaire, mais chacun essaie d'en faire peser sur l'autre la responsabilité.

Sur les moyens de la financer aussi, les adversaires s'opposent.

Le président Truman est partisan d'une méthode simple et directe de financement, par l'impôt.

Les républicains, au contraire, ont promis la réduction des impôts. Aussi espèrent-ils trouver les moyens d'aider l'Europe grâce aux bonis des instituts d'émission et au bénéfice de la recette fiscale.

Les États-Unis ont à leur budget quatre milliards de dollars de recettes en excédent des dépenses... Heureux pays !...

Dans huit mois , qui sera président des États-Unis ?

Déjà l'on parle de plusieurs candidats du côté républicain.

Parmi eux, M. Harold Stassen, qui se place à la gauche de son parti, semble avoir le plus de prestige. Sa récente discussion avec le généralissime Staline a achevé de le mettre en avant. Son caractère progressiste ne l’empêche pas d'être violemment anticommuniste.

D'une tendance nettement opposée est le sénateur Taft, fils de l'ancien président. Il représente l'extrême-droite antisyndicaliste et peut attirer à lui tout ce qui est nettement réactionnaire. Mais l'outrance même de sa position lui aliène des sympathies.

Aussi, parmi les candidats républicains, le gouverneur de l’État de New-York, M. Dewey, paraît avoir le maximum de chance. Il n'effraie ni la droite ni la gauche de son parti et sans doute n'effrayera-t-il ni la droite ni la gauche du pays... On nous invite à le voir prendre son petit-déjeuner avec sa femme est ses deux fils ou encore avec ses vieux parents dans une médiocre maisonnette du Middle West. On exploite à son profit toutes les réserves sentimentales – et elles sont nombreuses – des Américains.

Mais il y a Eisenhower, le prestigieux vainqueur de la guerre. Sa candidature n'est pas impossible. Elle rencontre deux obstacles : l'opposition d'Eisenhower lui-même, et la méfiance des milieux politiques envers un militaire.

Pourtant le vainqueur du tournoi ne sera-t-il pas Truman lui-même ? Son parti a été battu au dernier scrutin, mais les choses ne sont pas absolument liées. Les abstentions sont beaucoup moins nombreuses aux élections présidentielles. D'autre part, à ces élections, on vote beaucoup plus pour un homme que pour un parti. Or, la popularité du président s'est beaucoup accrue depuis un an.

Truman pourrait fort bien être le successeur de Truman...

 

Après les élections locales britanniques